mardi 8 janvier 2013

Capharnaüm...entre cour et cuisine. 7.

7/
Il y a mon jardin, et il y a cette bâtisse...
C'est dans sa cour, à son seuil, que j'ai regardé éclore les premiers bourgeons des fleurs qui ont fait mon jardin, et c'est à son perron que j'ai décidé de m'installer pour planter les fleurs que je transportais avec moi depuis si longtemps, graines fragiles, recroquevillées, semblant mortes...
Je crois même que si mon jardin voit ses fleurs pousser, c'est parce que cet immeuble le protège, le ceignant de ses hauts murs, prodiguant de l'ombre lorsque dehors tout est brûlant, lui restituant de la chaleur lorsque le froid voudrait tout anesthésier...
Mon jardin...
Ce bâtiment...
Imposant, intimidant...
Et puis, comme une gamine, j'ai commencé à le visiter, prenant une porte dérobée que je n'ai pas eu à forcer, elle était restée ouverte, comme sur d'autres possibles, comme pour inviter l'imprévu à y pénétrer...
Je fût cet imprévu (attendu?) qui n'est pas arrivé comme un squatteur jonchant le sol de saloperies diverses et variées, non, respectueusement, je suis entrée.
J'ai été impressionnée, je déambulais dans ces pièces inconnues, et pourtant, j'avais l'impression de les avoir déjà visitées avant, dans une autre vie, peut être...
Parlant pour me rassurer, j'ai entendu comme un écho. Mais ce n'était pas mes mots répétés, c'était mes maux mis à nu, comme je ne les avais pas vus, comme je ne les avais pas dit...
Un long échange à commencé au gré de mes visites dans cette bâtisse, chaque pièce découverte, avec cette impression de la connaitre déjà, me renvoyait à d'autres portes, cachées derrière des tentures, ou dans un coin d'ombre qui ne m'était pas familier...
Intriguée, captivée...
La moindre occasion m'était bonne pour filer m'y réfugier.
Cette maison me hantait.
Peu à peu, chaque recoin visité se faisait plus clair lorsque je revenais, je percevais chaque détail, de la beauté confirmée d'un élément qu'il m'avait semblé deviner, de la fissure profonde habilement cachée mais qu'un coup d'index replié met à jour lorsque l'on sait où sont les potentielles faiblesses...
J'aimais ce lieu, cet édifice qui pourtant ne faisait rien pour être remarquable, comme cherchant à cacher sa richesse aux badots qui depuis des années, passaient devant, s'y arrêtant parfois, mais jamais n'en découvrant la richesse...
Je n'ai pas voulu souiller ce lieu d'une présence imposée, alors je me suis installée à proximité, allant, venant, après m'être parfois pincé les doigts d'avoir voulu ouvrir sa porte qui voulait alors rester close.
La maison et son visiteur se sont apprivoisés, habillant les murs de leurs envies assouvies, de leurs désirs à réaliser, des images de leurs folies se mêlant..
Parfois aussi, d'immenses pans d'ombre ont voilé la beauté des pièces pourtant auparavant baignées de lumière, laissant un sentiment de vide immense, vide de la maison qui ne faisait plus même résonner les pas de la visiteuse, ses pleurs éclaboussant le plancher qui avait cessé de craquer sous ses pas, la maison se croyant vide...
C'est vrai que l'équilibre de certains murs peut sembler précaire, que sous le doigt effleurant les tapisseries, une écharde parfois peut mordre le doigt...Ou que c'est un ongle qui gratte le stuc et y laisse une empreinte comme une écorchure à vif...
J'aime cette maison comme jamais, moi la déménagée multiple, je n'ai jamais aimé aucun lieu...
Et même vide, je voudrais encore lui donner le goût de rester debout, de se remplir, de nouveau, de nos rires échangés, qu'ils soient nerveux ou fous, de nos corps imbriqués, en consolider les pans les plus fragiles, de nos larmes, faire pousser les plus belles fleurs, de celles qui résistent à tout, être le grelot tintinabulant avertissant ceux qui en franchissent le pas que ce lieu est magique, car il est la rencontre d'une visiteuse et d'un endroit que rien ne destinait pourtant à se croiser, et encore moins à sublimer autant l'un que l'autre...
Alors, vieille bâtisse, si Ta façade ne tiens que par le papier peint, j'en serais la colle, si Ta toiture a des fuites, je les boucherais de mes mains, si il fait froid en Ton sein, j'y appliquerais le mien...
Je t'aime.





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire